Le 2 mars 2024 se tenait une journée d'étude sur un sujet délicat à l'Université Libre de Bruxelles: "L'antisémitisme instrumentalisé, ou comment une lutte essentielle est détournée pour une mauvaise cause". Dans cette première partie nous écoutons quelques intervenants: le juriste belge François Dubuisson, la personnalité belge engagée comme "Juive laïque", Simone Susskind, et l'historien des idées Reza Zia-Ebrahimi, établi en Grande Bretagne.
Il se dégage un fil conducteur de ces interventions: alors que l'antisémitisme reste une réalité qui a changé de forme au fil des siècles, il est aussi l'objet de stratégies idéologiques et politiques aujourd'hui par les partisans de la politique israélienne. Cela consiste de la part de certains milieux intellectuels et politiques internationaux à amalgamer une critique légitime d'Israël à de l'antisémitisme. Et à intégrer cet amalgame dans une nouvelle définition de l'antisémitisme, sous l'égide de l'IHRA ( International Holocaust Remenbrance Alliance), une organisation intergouvernementale qui rassemble une quarantaine de pays, dont Israël et les USA. Ce qui a engendré une polémique, et face à cette définition des dizaines d'intellectuels juifs indépendants ont lancé " La déclaration de Jérusalem sur l'antisémitisme" qui appelait à distinguer ce qui relève d'une critique légitime d'Israël de ce qui peut être qualifier d'antisémite tel le refus de l'existence d'Israël.
D'autre part, alors que pendant des siècles sous l'influence d'historiens et autres intellectuels on a idéalisé l'âge d'or de la relation judéo-musulmane, dans le monde arabe et perse, depuis quelques décennies on inverse la dialectique: de plus en plus d'auteurs et d'autrices idéologues, tels Bat Ye'or ou Taguieff ont lancé l'idée que les musulmans veulent nous convertir et/ou nous envahir, et qu'il y a un profond antisémitisme arabe, au point où pour certain.es il aurait même, à travers Al Huseini, l'ancien mufti de Jerusalem, inspiré Hitler ! Fascinant tour de passe-passe...